L’Iran au cœur des crises du Moyen-Orient
29-01-2020
Mercredi 5 février, de 18 h à 19 h.
Avec Clément Therme
Clément Therme est docteur en histoire internationale de l’IHEID de Genève, chercheur post-doctorant au CERI et membre associé du CETOBAC à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS). Spécialiste du monde iranien, il a été auparavant chercheur à l’International Institute for Strategic Studies (IISS), assistant d’enseignement à l’Institut des hautes études internationales et du développement (IHEID) à Genève, chercheur à l’Institut français de recherche en Iran à Téhéran et chercheur pour le programme Moyen- Orient de l’Institut français des relations internationales (Ifri). Il a aussi été chercheur invité auprès de l’American Institute for Afghanistan Studies (Boston-Kabul) et chercheur post-doctorant à l’Institut de recherche stratégique de l’école militaire (IRSEM) et à la Faculté de théologie de l’Université de Genève. Auteur de nombreux articles sur l’Iran, l’Afghanistan et l’Asie centrale, il a notamment publié Les relations entre Téhéran et Moscou depuis 1979 (Presses universitaires de France, 2012) et co-dirigé Iran and the Challenges of the Twenty- First Century (Mazda Publishers, 2013).
La République islamique d’Iran a une politique régionale qui pose la question du nationalisme à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des frontières iraniennes dans les zones où Téhéran cherche à exercer une influence idéologique, sécuritaire et économique. Si la Révolution islamique de[masked] a bien eu pour conséquence d’encourager les élites politiques des États du Moyen-Orient à utiliser les questions confessionnelles pour définir leurs identités nationales, force est de constater que, plus de quarante après la Révolution, l’influence régionale de la République islamique a désormais pour effet non-désiré de provoquer une réaction nationaliste populaire notamment en Irak et en Afghanistan.
Cet affaiblissement du « soft power » iranien s’explique en premier lieu par l’incapacité de l’Iran à proposer un modèle alternatif positif de développement socio-économique et de gouvernance technocratique. En effet, l’influence idéologique de la République islamique s’est nourrie depuis les guerres d’Afghanistan (2001) et d’Irak en 2003 de deux facteurs principaux : d’abord, la montée en puissance de l’anti-américanisme dans des pays où la présence militaire américaine contribue à délégitimer les forces politiques alliées à Washington. Ensuite, en Irak, la marginalisation dans le champ politique national post-2003 du nationalisme séculier irakien et la promotion par les partis politiques irakiens d’identités politiques fondées sur l’ethno-confessionnalité a favorisé le développement de l’influence idéologique, sécuritaire et économique iranienne. La stratégie iranienne touche néanmoins ses limites à partir des années 2018 et 2019 avec des mouvements sociaux qui dénoncent publiquement « l’ingérence iranienne » en Irak notamment.
Sur le plan interne, on observe également un affaiblissement idéologique de la Révolution islamique et une contestation populaire de plus en plus étendue de la politique régionale de la République islamique. Ce mécontentement interne d’une partie significative de l’opinion publique iranienne signe l’échec de la propagande de la République islamique qui présente la stratégie régionale comme faisant partie d’une stratégie militaire de défense externalisée (forward defence).
Cela étant, l’actualité de janvier 2020 le démontre, le régime iranien conserve la capacité à mobiliser ses clientèles, voire au-delà, comme le prouve la mobilisation pour les cérémonies organisées à la suite de l’élimination par les États-Unis du général iranien Soleimani. En un sens, le président américain D. Trump (2017 – ) contribue à renforcer l’anti-américanisme à l’intérieur des institutions de la République islamique. Au-delà des dimensions internes à la politique régionale iranienne, cette conférence mettra en exergue les ramifications internationales de la politique régionale de Téhéran, la proposition iranienne « HOPE » pour la coexistence pacifique dans le Golfe Persique et la question de la dépendance sécuritaire des États du Golfe vis-à-vis de Washington qui demeure un obstacle à l’hypothèse d’une prolifération nucléaire régionale qui serait automatique à la suite de la nucléarisation de l’Iran. Le conférencier fera un point d’actualité sur cette question structurante, relancée par l’élimination par les États-Unis du général iranien Soleimani.
Avec Clément Therme
Clément Therme est docteur en histoire internationale de l’IHEID de Genève, chercheur post-doctorant au CERI et membre associé du CETOBAC à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS). Spécialiste du monde iranien, il a été auparavant chercheur à l’International Institute for Strategic Studies (IISS), assistant d’enseignement à l’Institut des hautes études internationales et du développement (IHEID) à Genève, chercheur à l’Institut français de recherche en Iran à Téhéran et chercheur pour le programme Moyen- Orient de l’Institut français des relations internationales (Ifri). Il a aussi été chercheur invité auprès de l’American Institute for Afghanistan Studies (Boston-Kabul) et chercheur post-doctorant à l’Institut de recherche stratégique de l’école militaire (IRSEM) et à la Faculté de théologie de l’Université de Genève. Auteur de nombreux articles sur l’Iran, l’Afghanistan et l’Asie centrale, il a notamment publié Les relations entre Téhéran et Moscou depuis 1979 (Presses universitaires de France, 2012) et co-dirigé Iran and the Challenges of the Twenty- First Century (Mazda Publishers, 2013).
L’enjeu de la conférence
L’élimination par les États-Unis du général iranien Soleimani, le 3 janvier 2020, enclenche un regain de tensions au Moyen-Orient. C. Therme en donnera les clés pour comprendre un mois d’actualité mais aussi mettre en perspective l’Iran au Moyen-Orient. Cela permettra à chacun d’avoir une compréhension géopolitique actualisée d’un sujet majeur dans sa profondeur historique.La République islamique d’Iran a une politique régionale qui pose la question du nationalisme à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des frontières iraniennes dans les zones où Téhéran cherche à exercer une influence idéologique, sécuritaire et économique. Si la Révolution islamique de[masked] a bien eu pour conséquence d’encourager les élites politiques des États du Moyen-Orient à utiliser les questions confessionnelles pour définir leurs identités nationales, force est de constater que, plus de quarante après la Révolution, l’influence régionale de la République islamique a désormais pour effet non-désiré de provoquer une réaction nationaliste populaire notamment en Irak et en Afghanistan.
Cet affaiblissement du « soft power » iranien s’explique en premier lieu par l’incapacité de l’Iran à proposer un modèle alternatif positif de développement socio-économique et de gouvernance technocratique. En effet, l’influence idéologique de la République islamique s’est nourrie depuis les guerres d’Afghanistan (2001) et d’Irak en 2003 de deux facteurs principaux : d’abord, la montée en puissance de l’anti-américanisme dans des pays où la présence militaire américaine contribue à délégitimer les forces politiques alliées à Washington. Ensuite, en Irak, la marginalisation dans le champ politique national post-2003 du nationalisme séculier irakien et la promotion par les partis politiques irakiens d’identités politiques fondées sur l’ethno-confessionnalité a favorisé le développement de l’influence idéologique, sécuritaire et économique iranienne. La stratégie iranienne touche néanmoins ses limites à partir des années 2018 et 2019 avec des mouvements sociaux qui dénoncent publiquement « l’ingérence iranienne » en Irak notamment.
Sur le plan interne, on observe également un affaiblissement idéologique de la Révolution islamique et une contestation populaire de plus en plus étendue de la politique régionale de la République islamique. Ce mécontentement interne d’une partie significative de l’opinion publique iranienne signe l’échec de la propagande de la République islamique qui présente la stratégie régionale comme faisant partie d’une stratégie militaire de défense externalisée (forward defence).
Cela étant, l’actualité de janvier 2020 le démontre, le régime iranien conserve la capacité à mobiliser ses clientèles, voire au-delà, comme le prouve la mobilisation pour les cérémonies organisées à la suite de l’élimination par les États-Unis du général iranien Soleimani. En un sens, le président américain D. Trump (2017 – ) contribue à renforcer l’anti-américanisme à l’intérieur des institutions de la République islamique. Au-delà des dimensions internes à la politique régionale iranienne, cette conférence mettra en exergue les ramifications internationales de la politique régionale de Téhéran, la proposition iranienne « HOPE » pour la coexistence pacifique dans le Golfe Persique et la question de la dépendance sécuritaire des États du Golfe vis-à-vis de Washington qui demeure un obstacle à l’hypothèse d’une prolifération nucléaire régionale qui serait automatique à la suite de la nucléarisation de l’Iran. Le conférencier fera un point d’actualité sur cette question structurante, relancée par l’élimination par les États-Unis du général iranien Soleimani.